lundi 4 février 2013

Permis de voyager de Guillaume Poutrain


Les Éditions de l'Aiguille sont heureuses de vous annoncer la sortie du recueil de poèsie "Permis de voyager" de Guillaume Poutrain.












































Permis de voyager 
De Guillaume Poutrain
Collection Poésie
97 pages ISBN 979-10-92143-00-3
1er trimestre 2013

Préface


De l'aphorisme à la poésie



La saveur des mots, le plaisir des images et une pensée sensible font la singularité de ces « aphorismes. » Quand le terme recouvre traditionnellement une maxime, une réflexion brève, Guillaume Poutrain invente son propre genre, quelque part entre l'idée et le poème ; si bien qu'on se délecte de parcourir ces pages, autant pour la trouvaille joliment tournée (« échanger la mer contre un souper de pluie », « une haleine forte de dictionnaire ») que pour la méditation qu'elle éveille. L'auteur s'y révèle comme un gourmet, curieux du sens caché, amoureux des parfums de la vie, mais aussi des jeux et musiques du langage qui le conduisent vers des formes toutes personnelles. Quand tant d'écrivains courent le roman pour tâcher de se faire un nom, l'artiste qui signe Permis de voyager suit obstinément son instinct tourné vers le texte bref, la poésie irrégulière et autres compositions qui ne relèvent que de l'amour de la littérature.

L'existence nous surprend par ses renversements : quand j'avais 16 ou 17 ans, au Havre, je me jetais à corps perdu dans la littérature en m'essayant à la prose poétique. A la même époque, mon cousin Guillaume, à peine plus jeune, semblait aborder la vie de façon romanesque. En quelques années, son énergie d'enfant turbulent allait faire place à un personnage mélancolique, épris de raffinement. Au gré des expériences, il inventait son propre monde comme un décor d'esthète, recherchant chez tel fripier le manteau le plus élégant, ou dans telle brocante le fauteuil qui conviendrait à l'écoute de Mahler dans le doux éclairage des chandelles.

Les années ont passé. Le hasard a voulu que le poète que j'avais cru être se transforme en romancier, et que Guillaume révèle son attirance de plus en plus aiguë vers la poésie. Attirance exigeante, qui cultive le goût de l'art pour l'art, la passion du détail, et réveille en moi la nostalgie du temps où j'aspirais d'abord à la perfection artistique des mots. Je le lis régulièrement, d'un recueil à l'autre, toujours avec bonheur et gourmandise ; je me réjouis parfois de retrouver entre les lignes ce qui nous rapproche : une forme de nostalgie familiale, quelques références normandes et l'amour de Flaubert. Parfois je me demande si je lui souhaite de s'essayer au roman, pour mettre sa prose imagée au service d'une histoire ; ou si je préfère le voir continuer dans cette voie où il ouvre des chemins si singuliers.

Je veux en tout cas le redire, pour finir : Guillaume Poutrain est un amoureux de la langue, mais sans rien de commun avec les fabricants de style et autres trafiquants d'écriture, qui représentent tout ce que je déteste en littérature... Lisez ces textes, et vous comprendrez qu'ici, la belle idée, la belle image racontent toujours quelque chose : un souvenir d'enfance, une blessure, une sentiment resté vif, une beauté fugace, un apprentissage musical ou littéraire. Ainsi, ces aphorismes réservent-ils différents degrés de lecture qui poussent à reprendre les pages, au hasard, pour les redécouvrir avec un plaisir nouveau.


  Benoit Duteurtre